Depuis quelques années, une formule défraye la chronique dans le monde des ONG qui défendent la faune sauvage : le Canned Lion Hunting, ou en d’autres termes, la chasse du lion en « boîte ». Il est largement temps de dévoiler au grand public ce qui se cache derrière ce concept pervers.
Les fermes d’élevage de félins
On dénombre plus de 160 fermes en Afrique du sud, spécialisées entre autres dans l’élevage de lions. L’objectif affiché est de contribuer à la préservation de l’espèce en créant des parcs où les lions peuvent se reproduire tranquillement, à l’abri de toutes menaces, pour être ensuite relâchés dans la savane lorsqu’ils ont atteint la maturité. Des touristes venus du monde entier visitent ces fermes qui leur permettent d’approcher des jeunes lions, de les nourrir, de les caresser ; on leur vend le rêve de la vie sauvage enfin à la portée d’une clientèle résolument urbaine. On peut, en l’espace de quelques heures, comme dans le feuilleton Daktari ou le fameux film Hatari, devenir une maman ou un papa de substitution pour ces lionceaux de quelques semaines. Pour aider les responsables des fermes, un grand nombre de volontaires eux-aussi venant de tous horizons, acceptent de payer des sommes rondelettes pour venir travailler au contact des lions et s’investir totalement dans les activités de nettoyage des enclos, de préparation des repas, de soins sommaires apportés aux animaux, mais aussi de la gestion des infrastructures touristiques. Si ces jeunes, qui ont payé leur billet d’avion ainsi que l’intégralité de leur séjour, travaillent efficacement dans leurs tâches quotidiennes, ils auront alors l’autorisation de nourrir les lions et de les accompagner lors des promenades avec les touristes, avec le statut officiel de soigneur. Et quand les lions auront enfin atteint la maturité, ils seront alors sortis de la ferme et relâchés dans la nature pour perpétuer l’espèce. Ainsi ces nombreuses fermes d’élevage contribuent directement à la préservation et à l’expansion des lions en Afrique.
Un effroyable concept : le Canned Lion Hunting
Malheureusement, cette belle histoire est complètement « marketée » et ne reflète certainement pas la réalité. Ces fermes n’ont d’autre ambition que de générer un gros volume de cash en attirant des touristes en mal de contact avec la faune sauvage et en s’appuyant sur des volontaires utilisés (manipulés) comme de réels travailleurs. Et comment les croire lorsque les managers nous expliquent leur programme d’insertion des adultes dans le milieu sauvage ? Qui peut penser une seule seconde qu’un lion qui n’a connu que son petit enclos, confronté à l’homme au quotidien, peut parfaitement survivre dans l’hostilité de la brousse quasiment du jour au lendemain ?
Il est rigoureusement faux de penser que les lions qui n’ont connu que l’homme et n’ont été nourris que par lui depuis leur plus jeune âge, une fois adulte et lâchés dans la brousse, sont capables de chasser par instinct. Cet argument est fallacieux. Dans la vie sauvage, les lionceaux sont régulièrement entrainés par leur mère à la chasse. C’est un long apprentissage qui ne s’improvise pas. Ceux qui prétendent le contraire sont des menteurs qui ont bâti une légende pour pouvoir justifier leurs actes cupides. De plus, les lionceaux qui n’ont pas eu la chance d’être élevés et entraînés par leur mère, sont dans l’incapacité de percevoir certains dangers représentés par d’autres prédateurs, léopards et hyènes, ou par des mâles adultes étrangers qui pourraient attaquer leur horde. Ils ne sauraient ni anticiper, ni avoir une réaction de fuite pertinente. Un lion qui serait relâché vers deux ou trois ans, en ayant connu uniquement l’homme, ne survivrait pas longtemps dans la brousse !
Mais la réalité est bien différente : une fois à l’âge adulte, ces lions, qui ont vécu toute leur vie en captivité, sont promis à une toute autre destination. Ils vont être proposés à des fermes de chasse d’un genre particulier qui permettent à de fortunés chasseurs l’aventure de leur vie : chasser un magnifique lion mâle dans de réelles conditions. Quelques jours avant la date prévue, le lion est sorti de son enclos et lâché dans un territoire de plusieurs milliers d’hectares dédiés à cet effet. Comme il n’a jamais eu l’habitude d’évoluer dans une aire aussi grande, il a tendance en général à se réfugier près des clôtures, ce qui est un comportement somme toute assez normal. Et cette réaction est connue et fort appréciée des organisateurs de la chasse qui n’auront aucune peine à le retrouver pour faire en sorte que leur client chasseur puisse abattre le fabuleux « animal sauvage », et ramener fièrement chez lui un trophée de valeur « amplement mérité » !
De 2 000 lions environ en captivité en Afrique du sud au début des années 2000, on est rapidement passé à plus de 6 000 récemment. Inutile d’expliquer l’engouement des fermiers vers ce nouveau type de business qui met en exergue le prétexte trompeur pour la conservation de l’espèce.
Un modèle économique ne souffrant d’aucune faille
Ce business florissant s’explique en fait par un modèle financier très efficient. Les touristes paient pour venir caresser les lionceaux, leur donner le biberon, pour se promener avec eux dans la savane, le tout sous le contrôle de volontaires qui en plus vont chercher la nourriture auprès de fournisseurs, nourrissent les lions, nettoient leurs enclos, les soignent au quotidien, sans être rémunérés, bien au contraire, puisqu’ils ont au préalable payer leur vol et les frais afférents à leur séjour.
Et au final, lorsque ces fermes ont encaissé le chiffre d’affaires généré par leurs clients touristes avec une main d’œuvre sur laquelle ils gagnent en plus de l’argent, ils vendent les lions adultes aux fermes de chasse qui pratiquent le Canned Lion Hunting …
Ainsi, en attendant que le législateur sud-africain daigne enfin interdire définitivement la pratique de la chasse du lion en boîte, nous ne pouvons qu’appeler à un intense discernement, si vous, en tant que volontaire, décidez d’aller travailler dans un centre œuvrant à la conservation des lions. Il est essentiel de vous assurer au préalable que vous n’êtes pas en présence d’une organisation gérée par ces criminels qui ne pensent qu’au profit. Si vous suivez régulièrement notre actualité, vous serez tenus au courant des comportements que vous devez avoir et de la manière dont vous devez conduire vos recherches si vous avez envie de travailler en tant que volontaires dans certaines fermes.