Quel lien peut-on faire entre un massacre perpétré dans un centre commercial de Nairobi et le braconnage des éléphants d’Afrique ?
La réponse se résume en fait dans la célèbre phrase prononcée lors de l’affaire du Watergate en 1974 : « suivez l’argent ! »
Les éléphants sont, depuis quelques années, massacrés en masse sur tout le continent africain. Un éléphant est braconné toutes les 15 minutes. Les autorités scientifiques ont tiré le signal d’alarme et ont prévenu les différents gouvernements concernés, qu’à ce rythme, la population à l’état sauvage pourrait bien disparaître d’ici quinze à vingt ans.
Mais la lutte contre le braconnage n’est pas simplement qu’une affaire de protection d’une espèce sauvage, aussi emblématique soit elle. Cette lutte participe également du combat contre le terrorisme.
L’organisation terroriste islamiste Al Shebbaab, qui sévit dans la région que l’on nomme corne de l’Afrique, a eu besoin lors de sa création au début des années 2000 de financement. En rackettant les pirates du golfe d’Aden, et en participant également à des kidnappings contre rançons en Somalie ou dans le nord du Kenya, les sommes ainsi récupérées lui permettaient de financer ses réseaux, de former les terroristes et de les équiper avec de l’armement moderne. Or, depuis que les différents armateurs ont équipés leurs navires de gardes armés, Al Shebbaab s’est tournée alors vers un marché beaucoup plus juteux tout en étant moins risqué : « l’or blanc », c’est-à-dire l’ivoire d’éléphant !
Aujourd’hui, près de la moitié du budget des terroristes de cette organisation provient du braconnage des éléphants des pays environnants. Vendu en moyenne 7 000 $ le kilo d’ivoire sur les marchés noirs du sud-est asiatique, il est évident que l’abattage de cinq éléphants portant des défenses de taille moyenne suffit à équiper et entraîner une équipe comme celle qui a perpétré l’attentat du Westgate à Nairobi.
Mais croire que le mouvement Al Shebbaab est principalement responsable de la mort de centaines d’éléphants est réducteur. D’autres organisations ont très bien compris l’intérêt qu’il y avait à se lancer dans le braconnage pour financer la terreur. On peut citer les différentes branches d’Al Qaïda en Afrique de l’ouest mais également Boko Haram qui déciment les quelques centaines d’éléphants survivants en Afrique de l’ouest, ou les miliciens Janjawid du sud Soudan connus pour leurs exactions sur les populations d’éléphants d’Afrique centrale.
Combattre les braconniers pour défendre les éléphants est une cause juste. Mais pour ceux qui pensent que la priorité n’est pas aujourd’hui sur les espèces en danger, qu’ils comprennent que lutter contre le braconnage permet de lutter contre le terrorisme. Sans financement, il est difficile pour les organisations extrémistes de mettre en place des opérations d’envergure, mobilisant des individus entraînés et de l’armement.
Le conflit de l’ivoire est bien un élément prépondérant de la chaîne de mort, celle qui commence par le massacre des éléphants et qui se termine par le massacre d’êtres humains !
L’argent versé par les acheteurs asiatiques alimente les filières du crime dans l’est et le sud de l’Afrique, mais surtout les réseaux terroristes, et Al Shebbaab en particulier.
Il est urgent d’agir pour l’avenir de la faune africaine mais aussi pour le bien-être de l’humanité !